A l’école maternelle ou primaire, les enfants reçoivent parfois des bons points ou des images pour les récompenser d’un bon travail. On peut discuter ce genre d’initiative. Mais avec des enfants de cet âge, il s’agit de jouer sur l’affectif, on est dans le relationnel. Passe encore !
Le Recteur de l’Académie de Créteil, profitant des fonds d'expérimentation pour la jeunesse, vient de lancer un projet stupide et dangereux. Des classes de lycée professionnel vont bénéficier d’une cagnotte initiale de 2000 euros, cagnotte qui pourra monter à 10 000 euros, rien que ça. Le but est de lutter contre l’absentéisme. Oui, oui, vous avez bien lu. Les inventeurs de ce dispositif y ont drôlement réfléchi, indicateurs de présence, de résultats scolaires, de discipline et d'orientation sont prévus. On va compter les présents, les enfants sages et travailleurs. Tout sera mis au pot. Il s’agit de jouer sur l’esprit de groupe et sur la notion de contrat. Ben tiens donc !
A mon avis, ils ont du mal lire les articles de pédagogie traitant de ces concepts ou encore les comptes-rendus d’expérience des équipes d’enseignants qui, dans le cadre du PNI par exemple, ont élaboré des projets pour justement traiter ces problèmes d’absence, de discipline, etc ... D’ailleurs une élève « interviouvée au JT de 20 heures » l’autre soir, ne s’est pas trompée en évoquant l’émission de télévision « Le maillon faible », basée fondamentalement sur l’élimination de celui qui fait perdre les autres.
Car enfin où va-t-on ? Se rendre en classe est le minimum que puisse faire un élève. Respecter les profs et travailler aussi. Alors comme ça, on va les financer pour avoir accompli ce minimum. Je sais bien que certains jeunes connaissent de graves difficultés et je pense qu’il faut tout mettre en place pour les en sortir. Mais je suis aussi convaincu qu’il ne faut pas se payer leur tête au sens propre comme au figuré. Ils ont droit au respect de la société, instruction, éducation, culture, épanouissement personnel, santé, insertion dans la société. Au lieu de cela, on les méprise en les appâtant par l’argent. On maquille la chose en pédagogie de contrat, en esprit de groupe. Ces brillants pédagogues ont-ils réfléchi aux conséquences de leur initiative. L’argent, une valeur morale ? L’effort personnel à la poubelle ? Le groupe, un carcan pour l’individu ou un cadre pour s’exprimer, se réaliser ?
« Alors maintenant, pour dresser la table, maman tu allonges 11 euros pour 5 assiettes. 5 fois 2. Je me suis trompé ? Non, et l’inflation qu’est-ce que tu en fais ? »
Laurent Catelle